11 janv. 2011

Asterios Polyp

Posted by Yann On 1/11/2011 08:35:00 PM 1 tête(s) de smeg !


David Mazzuchelli s'était fait remarquer à la fin des années 80 en illustrant Batman: Year One et Daredevil: Justice Aveugle sur des histoires de Frank Miller. Il avait ensuite très vite délaissé l'univers des super-héros pour se pencher sur des projets un peu plus personnels comme l'adaptation de Cité de Verre, le célèbre roman de l'auteur new-yorkais Paul Auster et surtout son Big Man qui nous avait déjà laissé entrevoir tout son talent en 1998.
Et depuis, plus rien. Mazzuchelli se consacrait depuis maintenant 12 ans à l'enseignement de la bande dessinée. Son parcours atypique et ses précédents travaux nous laissaient entrevoir un homme cultivé et talentueux, mais rien ne nous avait préparé à recevoir Asterios Polyp, véritable chef-d'oeuvre du neuvième art...


Asterios Polyp nous raconte l'histoire du personnage éponyme, un architecte théorique (aucun de ses travaux n'a jamais été construit) qui enseigne à l'université (David, c'est toi ?), qui voit le monde en binaire (il pense toujours en termes de dualité) et plus particulièrement de sa rencontre avec Hana, une jeune artiste qui deviendra sa femme (puis son ex-femme) à qui tout l'oppose mais qui va changer sa vie.

À partir de cette histoire toute simple et maintes fois contée, Mazzuchelli nous délivre une oeuvre qui pourrait bien représenter à elle seule la quintessence de la bande dessinée. Avec son style épuré à l'extrême (il n'utilise que 3 couleurs), le génial auteur utilise tous les outils à sa disposition, tous les codes de son art, pour tenter (et réussir) de nous livrer une radiographie de l'Humain dans toutes ses contradictions et des relations humaines dans ce qu'elles ont de plus beau et de plus complexe.
Le style est donc épuré, le texte est aussi simple que l'histoire, mais Mazzuchelli parvient pourtant à nous livrer une œuvre d'une immense richesse dont il est impossible de saisir toutes les nuances en une seule lecture. Tout passe par le dessin et par le découpage des planches. Chaque personnage à son propre style graphique, depuis ses traits jusqu'à ses couleurs en passant par le design de ses bulles ou sa typographie, tous les êtres qui parcourent la vie d'Asterios sont uniques et point besoin de décrire les émotions lorsqu'il interagit avec ceux-ci puisque, là aussi, tout passe par le dessin. L'exemple le plus frappant est sans aucun doute celui de sa première rencontre avec Hana, le style angulaire, géométrique et bleu d'Asterios se confronte à celui brouillon, hachuré et rose d'Hana. Mais, au fur et à mesure que la conversation se déroule, les deux styles fusionnent pour finir par ne faire plus qu'un, et là, Mazzuchelli a tout simplement réussi quelque chose d'immense, il vient de dessiner l'Amour !

Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, mais je n'ai pas envie d'en dévoiler d'avantage pour ne pas gâcher le plaisir de ceux qui n'ont pas encore eu l'occasion de mettre la main sur ce chef-d'œuvre. On pourrait disserter des heures sur la profondeur de l'œuvre, sur l'importance de chaque minuscule détail qui nous paraissent souvent anodins mais qui se révèlent tous capitaux. Et tout devient encore plus limpide lors de la seconde lecture.

Asterios Polyp s'impose comme une œuvre majeure, une oeuvre qui fera date tant elle représente fondamentalement ce qu'est la bande dessinée en tant qu'art, jamais auparavant on n'avait vu une telle osmose entre le fond, la forme et le médium.




Mathieu

1 tête(s) de smeg !:

Han, ça a l'air vachement bien !
C'est là que je me rend compte que je suis bien à la masse question BD, ça donne envie de s'y mettre en tout cas !